Qui construit Ethereum ? Pour répondre à cette question, cette série d’interviews présente les français qui y contribuent au sens large : développeurs du protocole, développeurs d’applications, graphistes, investisseurs, utilisateurs, membres actifs de la communauté…

Aujourd’hui nous rencontrons Mokhtar Bacha, fondateur et CEO de Shipl

Bonjour Mokhtar, merci de prendre un peu de temps pour Ethereum-France aujourd’hui. Pour commencer pourrais-tu te présenter en quelques mots?

Bonjour, je suis Mokhtar Bacha, CEO de Shipl. Shipl est une startup qui résout le problème d’UX des dApps.

Sacrée promesse que tu nous fais avec Shipl ! Comment traites-tu les difficultés liées à l’UX ?

Oui, clairement. Les difficultés liées à l’UX se divise en deux sous-problèmes : la gestion des clés privées et la gestion de l’Ether (gas, prix, coût et volatilité).
La gestion des clefs privée est aujourd’hui complexe. L’utilisateur doit installer un wallet tel que Metamask, une extension Chrome, et il est souvent difficile voir impossible pour lui de récupérer son wallet en cas de perte de la clef privée.


La gestion du gas est compliquée pour l’utilisateur moyen, car cela nécessite pour lui d’aller acheter de l’Ether sur une plateforme d’échange et de payer pour chaque interaction avec une dApp. C’est un peu comme si l’on demandait aux utilisateur de Netflix de payer et leur abonnement Netflix et les services d’AWS.
Concernant la gestion des clefs privées : on crée un smart contract wallet avec une des clés privées sauvegardées sur nos serveurs. L’utilisateur peut donc prendre contrôle des clés privées s’il le souhaite, et avoir un smart wallet complètement décentralisé.   

La gestion des clés privées, ce n’est pas simple, n’y a-t-il pas des problèmes de sécurité lié à la conservation des clés sur un même serveur ? Quelles sont les problématiques particulières à la conservation sur le plan technique ?

Chez Shipl, les clés privées sont stockées sur des HSM (Hardware Security Module) dans le cloud. Cela permet un bon niveau de sécurité. On ne voit jamais la clé privée, le contrôle est délégué au compte AWS. Il faut donc sécuriser le compte AWS, et c’est pour cela que nous avons des audits de sécurité pour s’assurer  que nous sommes conforment aux normes les plus exigeantes tel que SOC 2 Type 2 ou PCI/DSS. 
Concernant le débat autour de la centralisation des clefs privées, chez Shipl nous abordons ce problème d’un point de vue technologique de manière pragmatique et non idéologique, ce qui en fait un problème fondamentalement simple à résoudre. Pour un utilisateur moyen,  un wallet centralisé, ne pose pas de  problème. Surtout que nous permettons à nos utilisateurs de pouvoir utiliser leur wallet de façon décentralisée s’ils le souhaitent. 
Concernant la deuxième difficulté évoquée, à savoir la gestion de l’Ether, nous proposons un deuxième produit chez Shipl:  notre service de Meta Transactions. De manière générale, lorsqu’un utilisateur souhaite signer une transaction et l’exécuter, mais n’a pas d’Ether sur son compte, il est bloqué car il ne peut pas payer le coût du gas. Notre service de Meta Transactiosn lui permet  de signer la transaction mais l’exécution de celle-ci est déléguée à un smart-contract wallet qui représente l’utilisateur. Celui qui envoie la transaction sur le réseau n’est plus l’utilisateur mais un relais : Shipl. C’est donc Shipl qui paye les frais de gas à la place de l’utilisateur.

Schéma d’une méta transaction

Quel est le rôle des relayeurs et quel est leur intérêt ?

Shipl est un SaaS : les créateurs de dApps créent un compte, puis créditent ce compte et obtiennent ainsi une balance de gas. Ils formalisent ensuite les règles d’attribution de cette balance. Par exemple, ils peuvent décider de payer un certain nombre de transactions de leurs utilisateurs et les bloquer ensuite. Ils intègrent ensuite le SDK Shipl dans leur dApp avec seulement  une ligne de code. 
A chaque fois qu’un utilisateur exécute une transaction, c’est Shipl qui paye les frais de transactions dès lors que la balance du compte est suffisante.
Nous travaillons également pour développer  un niveau d’abstraction encore plus élevé où l’utilisateur n’aura plus besoin d’Ethers pour interagir avec les dApps. Notre vision est de créer une expérience qui soit blockchain-less.
Nous prévoyons de lancer le produit dans le courant de l’été 2020.

Du coup, pourquoi as-tu choisi de rentrer dans l’écosystème Ethereum et décidé de construire Shipl sur Ethereum ?

En 2015, je travaillais sur le diagnostic du paludisme. A 15 ans c’est compliqué d’avoir accès à de larges échantillons de paludisme, du coup avec les informations que j’avais, je n’ai pas pu entrainer mes algorithmes de machine learning pour diagnostiquer le paludisme. Au même moment je me suis éduqué sur la blockchain, cela m’intéressait, et je me suis demandé si je pouvais utiliser la blockchain pour des applications de santé. J’ai donc développé une première dApp sur Ethereum pour gérer les données de santé entre hôpitaux. J’ai postulé à un concours organisé par le gouvernement de Dubaï sur la blockchain. J’ai donc été en 2017 à Dubaï, pour pitcher mon projet devant le gouvernement du pays. Les 3 premières personnes du bureau de ConsenSys à Dubaï étaient présentes lors de cet événement. Ils ont aimé mon travail et ont organisé un call avec Joseph Lubin. Joe m’a apprécié et m’a invité à New York.
Ma dernière année de lycée, je suis parti deux mois à New York, pour rejoindre ConsenSys et continuer à travailler sur la santé et Ethereum. Au final, j’ai été recruté comme plus jeune employé de ConsenSys, en tant que développeur,  a 17 ans.
En travaillant chez ConsenSys, j’ai compris que le problème d’UX touchait énormément de dApps sur le marché et c’est donc ainsi que j’ai commencé à travailler dessus. En juillet 2018, j’ai eu l’idée de faire un SDK de Meta Transactions as a service. En 2019 j’ai pu commencer à travailler sur Shipl à plein temps, grâce à un investissement en pre-seed de ConsenSys.

Pour toi c’était donc une évidence de rester sur Ethereum? Tu avais regardé d’autres blockchains?

Aujourd’hui Ethereum est la blockchain dominante sur le marché des dApps et encore plus pour la DeFi (finance décentralisée).
Malgré tout chez Shipl nous sommes blockchain agnostiques, il y a beaucoup de projets intéressants, je crois que le marché va beaucoup évoluer dans les années à venir.

Quel est ton rapport à la spéculation autour des crypto-monnaies ?

J’ai acheté du bitcoin il y a très longtemps, j’ai fais une petite plus value qui m’a permis de lancer ma première startup et d’acheter mon premier ordinateur. Je ne suis pas un investisseur, ni un spéculateur. Dans un monde idéal, j’aimerai un prix de l’Ether stable. 

Peux-tu nous parler d’une application Ethereum utile ?

Je suis un fan de DapperLabs et de ce qu’ils font dans l’industrie du jeu vidéo. Sinon j’aime beaucoup Dharma, l’UX est vraiment top.
Malgré tout je crois que c’est une mauvaise compréhension du marché que de croire que la croissance du marché dApp proviendra d’une “killer dApp”. Je pense que la croissance est déjà là et elle provient de l’agrégation de nombreux smart contacts et protocoles composés ensemble. Cette tendance a déjà commencé dans la DeFi où des primitives financières construites par différentes équipes indépendantes sont combinées ensemble pour créer des produits plus complexes et avancés (par example MakerDao + Compound = Dharma). La limite est vraiment l’imagination des développeurs ce qui me rend très optimiste quant au futur du marché.

Commentaires

Commentaires

  1. Les francais qui font ethereum | Crypto News Source
    11 juillet 2020 - 09h17

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